Obsolescence programmée

Pour ma troisième chronique écologique à la radio, je voulais pousser un coup de gueule. Oui, oui, comme quoi il semblerait qu’on puisse s’énerver en parlant d’écologie. Et d’électroménager. Je voulais notamment vous parler de :

  • mon vidéoprojecteur qui ne marche plus
  • mon lecteur MP3 qui n’a jamais marché
  • mon appareil photo qui ne marche plus
  • ma tablette qui déconne
  • la machine à café méga cher du travail qu’on change tous les 13 mois.

Pourquoi ça ? Quel rapport ? Eh bien parce que ces objets ont tous laché 1, 2 ou 3 mois après leur fin de garantie. Pas de chance ? Bon, je ne suis pas adepte des théories du complot mais là, il y a quand même moyen de douter et de s’énerver après toutes ces défaillances juste après la fin de la garantie.

Alors, je vais vous parler de l’OBSOLESCENCE PROGRAMMÉE !!

C’est généralement ce qui fait dire à nos mamans :

“C’était mieux avant ! Cette machine a lavé tes grenouillères et tes bavoirs, c’est pas une machine d’aujourd’hui qui durera aussi longtemps !!”.

Voilà pour la définition de nos mamans.

Pour la définition de Wikipédia, l’obsolescence programmée c’est :

“l’ensemble des techniques visant à réduire la durée de vie ou d’utilisation d’un produit afin d’en augmenter le taux de remplacement”

… pour s’en mettre plein les fouilles. Mais ici, je ne vais pas (trop) parler de marketing et ne citer que…

Les aspects techniques de l’obsolescence

  • L’obsolescence désigne la pression (commerciale, technique) à remplacer un appareil qui marche encore parfaitement : iPhone pas VI, PC portable non tactile, réfrigérateur sans dégivrage automatique, écran cathodique… C’est surtout de nos jours des effets de mode. Ceux qui, comme moi, n’ont pas de smartphone voient très bien de quelle pression je veux parler !!
  • L’obsolescence programmée c’est la conception de produits comprenant des fragilités délibérées. Et ça, c’est tout de même pas très très gentil.

Historique

Elle a été théorisée dans la crise économique des années 1930 par un agent immobilier répondant au doux nom de Bernard London, en passe de devenir mon agent immobilier préféré si tant est que j’en aie un.

Le dit Bernard – dont l’histoire ne nous dit pas s’il est frère de Jack mais qui aurait sans doute mieux dû aller faire un tour dans la forêt plutôt que d’écrire Ending the depression through planned obsolescence – regrettait que les consommateurs aient pris l’habitude, à cause de la crise, d’utiliser un produit jusqu’à ce qu’il soit hors d’usage.

Non, mais vraiment, quelle idée saugrenue ils ont eu là, les consommateurs !

Mon cher Bernard pensait que le gouvernement devait obliger les consommateurs à rendre un produit avant qu’il soit usé afin de mieux faire fonctionner l’économie, sauver les États-Unis et par là même le monde, sauf peut-être les Indiens (d’Inde) chargés du traitement des appareils électroniques en fin de vie et les porte-avions pleins d’amiante.

Hélas, sa recommandation a été assez bien suivie par quelques industriels dénués de scrupules…

Quelques exemples d’obsolescence programmée

  • la fameuse histoire des bas en nylon qui ne filaient pas assez vite et que la firme DuPont a donc dégradés (ou plutôt dés-améliorés) pour en vendre plus régulièrement et soit dit en passant faire chier un certain nombre de femmes étant déjà en retard à leur réunion, dîner ou soirée qui s’aperçoivent avec HORREUR que leurs bas viennent de filer.
  • les cartouches d’imprimante équipées de puces électroniques interdisant leur réutilisation après remplissage ou après un certain nombre de pages imprimées. Elles ont été vendues jusqu’en 2006, soit 4 ans après que la commission européenne interdise cette pratique. Quatre ans pour faire retirer une puce des cartouches produites, c’était pas un peu long ??
  • les éléments soudés non remplaçables élément par élément, comme par exemple la pompe à vide de feu ma corsa B montée sur l’alternateur. Vous ne voyez pas le lien entre ces deux éléments, moi non plus, mon garagiste non plus. Le fait est que ces éléments sont tombés successivement en panne et j’ai dû changer deux fois cette pièce combinée. Ceci est aussi valable pour les batteries de téléphone soudées à la coque, qui vous font changer TOUT votre téléphone (pour ne pas citer une marque à pomme)
  • ainsi que les appareils sans pièces de rechange ou consommables de rechange, ou simplement des pièces de rechange très chères en comparaison du prix de l’équipement neuf
  • enfin, les problèmes de compatibilité qui entraînent de fait une obsolescence technique. Pour ne citer aucune grosse marque avec une pomme (encore elle !), on peut booster ses ventes d’accessoires en changeant toutes les connecteurs de ses appareils, ce qui fait que le client déjà équipé doit racheter tous les accessoires pour la nouvelle version.

Quelles conséquences ?

  • La durée de vie active des équipements électroniques a été divisée par trois en une génération. Un ordinateur était utilisé onze ans en 1985, contre trois aujourd’hui
  • Seuls 44% des appareils qui tombent en panne sont réparés, selon l’Ademe
  • Cela génère un flux très important de DEEE (dites D3E), déchets d’équipements électriques et électroniques, à hauteur de 6,4 kg/hab/an pour La Réunion et trois fois plus en métropole. Ces déchets sont potentiellement dangereux et malheureusement souvent exportés, en Afrique ou en Asie notamment pour être traités.
  • Une explosion de la demande en métaux, pouvant représenter par exemple le quart du poids d’un téléphone portable. Ces métaux et terres rares sont souvent extraits dans les pays du Sud, par des multinationales du Nord, dans ces conditions sociales et environnementales très discutables.

Alors quelles solutions ou alternatives ?

  • Faire réparer ses appareils, avec un super site mis en ligne récemment : reparer.re qui recense les réparateurs sur toute l’île et en métropole le site www.produitspourlavie.org
  • Réparer soi-même ses appareils, au Réparali Café, avec des conseils sur les forums sur Internet, ou sur des sites comme IfixIt qui recense des pièces détachées, des réparateurs mais surtout des tutoriels vidéo pour réparer soit même ses appareils ! voir aussi www.commentreparer.com et plein, plein d’autres sites, quand on cherche un peu.
  • Se renseigner sur le matériel qu’on s’apprète à acheter, certaines marques affichent des durée test d’utilisation de plusieurs décennies. Elles doivent aussi indiquer combien de temps sont disponibles les pièces détachées.
  • Acheter des marques connues pour durer, ou avec une garantie TRES longue : aspirateur Dyson, cafétière Malongo, sacs Eastpack, etc. Consultez les avis d’experts et d’utilisateurs sur Produits Durables, et donnez votre avis.
  • Payer une extension de garantie
  • Louer ses appareils.

Je vous signale que des dispositions concernant ce problème sont actuellement examinées au Sénat, dans le projet de loi sur la transition énergétique. Elles ont été bien rabotées par nos sénateurs, fidèles à leur belle image d’immobilistes. Le texte prévoit tout de même de punir le délit d’obsolescence programmée d’une peine de deux ans d’emprisonnement et de 300 000 € d’amende. Reste à voir comment prouver cela !

Mais il est clair que l’obsolescence programme et les éventuelles “défaillances techniques précoces” ne sont qu’une petite partie du problème et que nos habitudes de consommation sont le plus souvent responsables :

  • avoir tous une voiture, un ordi, une télé, un tablette, un appareil photo, ou mutualiser un peu ?
  • nettoyer ou formater son ordi, ou en racheter un ?
  • acheter pas cher chinois, ou acheter plus cher européen et sans doute plus durable ?
  • acheter des trucs lavables ou des trucs jetables ?

Bref, il va falloir tourner sept fois un article dans votre main avant de le mettre dans votre panier !!

Sources :     Wikipédia,

L’obsolescence programmée, symbole de la société de gaspillage, Les Amis de la Terre et le CNIID, septembre 2010.

Guide de lutte contre l’obsolescence programmée, Les Amis de la Terre, février 2015

3 réflexions sur « Obsolescence programmée »

  1. Un film produit par Arte à voir : « PRÊT à JETER, l’histoire méconnue de l’obsolescence programmée »
    Dans les pays occidentaux, on peste contre des produits bas de gamme qu’il faut remplacer sans arrêt. Tandis qu’au Ghana, on s’exaspère de ces déchets informatiques qui arrivent par conteneurs. Ce modèle de croissance aberrant qui pousse à produire et à jeter toujours plus ne date pas d’hier. Dès les années 1920, un concept redoutable a été mis au point : l’obsolescence programmée. « Un produit qui ne s’use pas est une tragédie pour les affaires », lisait-on en 1928 dans une revue spécialisée. Peu à peu, on contraint les ingénieurs à créer des produits qui s’usent plus vite pour accroître la demande des consommateurs.

  2. Quelques précisions et mises à jour :
    – en Europe, la garantie obligatoire est de 2 ans, malgré ce qu’on vous laisse croire !
    – le site http://www.produitsdurables.fr note les marques selon leur durabilité et réparabilité. A consulter avant tout achat (ou avant de jeter, pour des conseils de réparation).

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