L’été sera chaud !

Quoi de neuf par ici ?

A La Réunion, c’est l’hiver, avec le vent, les baleines et l’eau froide, à 24°C…

En Métropole, c’est le début de l’été, prétexte à une nouvelle chronique écologique ! La version radio est disponible ici pour la 18e émission et bientôt en Podcast grâce à la toute nouvelle application RadioLGB, pour Apple et Androïd. Je vous en fais une version épurée sur ce blog, ce qui vous épargne toutes les blagues de mauvais goût de l’émission (qui sont en partie de mon fait, je le concède) !

Vous n’êtes pas sans savoir, ou alors peut-être que si, vous êtes sans savoir, et je vous l’apporte alors sur un plateau d’argent, que 2014 a été la plus chaude au niveau mondiale, depuis que l’homme est l’homme, ou plutôt depuis que les températures sont enregistrées au niveau mondial.

La moyenne des températures mondiales a été en 2014 supérieure de 0,7°C par rapport aux moyennes prises sur le XXe siècle. Cette différence à la normale est plus élevée dans l’hémisphère Nord que l’hémisphère Sud. En France, on est même à +1,2°C.

Il y a eu néanmoins des zones avec des températures plus froides que d’habitude, avec les blizzards et l’hiver difficile à New York. Ce fut aussi le cas en Antarctique, ce qui a des conséquences graves. Mon amie Léa qui est en Terre Adélie (pour MétéoFrance) m’explique qu’avant 2012, la banquise fondait autour de l’île Dumont d’Urville, où se réfugient chaque année plusieurs milliers de manchots Adélie pour pondre un œuf et quelques dizaines de scientifiques français pour pondre une thèse.

Si les scientifiques peuvent mettre des chaufferettes dans leurs moufles et faire des rotations d’hélicoptères du bateau à la base et de la base au bateau (argh ! le déficit public nom de nom!), les manchots sont plus affectés par ces années exceptionnelles… En effet, la glace ne dégèle pas et ils ont 16 km à faire à pied pour aller se nourrir. Je vous propose d’imaginer 16 km à parcourir, ce qu’il font en 2 heures en nageant, mais hélas, en 8 heures à pied. C’est un peu imaginer enlever son déambulateur à Mamie qui doit aller chercher son pain.. Vous imaginez bien qu’il en a qui ne reviennent pas… Vous aviez d’ailleurs pleuré devant le film la marche de l’Empereur, qui décrit toutes les embûches pour la reproduction d’un couple de Manchots.

Donc 2014, année la plus CHAUDE jamais connue, avec des disparités. En 2015, on démarre fort, très fort. Mai 2015 est à nouveau “the hottest month ever”. Ça démarre si fort que s’il n’y a pas d’éruption volcanique majeure d’ici à la fin de l’année, nous sommes à peu près sûrs que l’année 2015 marquera un nouveau record de température.

Et nous, à La Réunion ? On n’est pas en reste, avec les deux années les plus chaudes (depuis 1969, année érotique… mais aussi début des enregistrements sur toute l’île) enregistrées en 2011 et 2014. C’est l’été surtout, qui est plus chaud qu’avant.

A vrai dire, je n’ai pas la sensation que l’île de La Réunion soit véritablement menacée par le réchauffement climatique. Je pense qu’on est ici peu vulnérables, notamment du fait des ÉNORMES investissements qui ont été réalisés en termes de :

– sécurisation par rapport aux risques naturels. Personne n’est parfaitement protégé, je vous l’accorde, mais on est tout de même bien moins vulnérables que Madagascar ou l’archipel des Comores…

– limitation de l’érosion marine. C’est un gros risque pour les archipels coralliens de rêve, comme les Seychelles, les Maldives ou encore le Vanuatu ou les îles Karibati, sources des premiers réfugiés climatiques. La montée des eaux, les évènements violents comme les cyclones ainsi que la dégradation des récifs coralliens, barrière naturelle contre la houle, font que les îles sont grignotées petit à petit et rentrent dans une compétition ridicule entre une digue en béton et les courants marins.

– risque de sécheresse. L’île de La Réunion détient tous les records mondiaux de pluviométrie entre 12 heures et 15 jours. Je crois que c’est le seul territoire au monde à avoir creusé dans les montagnes des galeries pour transférer l’eau des versants Est, au vent, très arrosés, vers les versants Ouest, sous le vent, semi-arides. En termes de consommation de subventions européennes, on a sans doute un autre record, ainsi que pour le retard et les surcoûts du chantier.

Donc, le réchauffement climatique à La Réunion, bof, on on s’en fout un peu ! S’il fait chaud, on allume la clim, clim qui marche à l’électricité, électricité produite majoritairement à base de charbon et de fioul… Argh !

Notons quand même un projet de climatisation marine (SWAC), en allant chercher l’eau froide des profondeurs, comme les réseaux de froid qui fonctionnent à paris grâce à la fraîcheur des eaux de la Seine. Hélas, je viens de lire que les tuyaux utilisés seront fabriqués sans soudure en Norvège puis remorqués jusqu’ici… Soit la distance honorable de 15 000 kilomètres environ, mais puisqu’on vous dit que c’est pour la bonne cause !

Citons aussi l’ambition politique de devenir autonome électriquement en 2030, avec 100% de l’électricité fournie qui serait d’origine renouvelable (et 50% en 2020). C’est une ambition louable, sans doute utopiste et pas toujours vertueuse, quand on regarde les autres thématiques environnementales (le paysage notamment !!). Je vous en reparlerai sûrement.

Cette ambition de faire de La Réunion et de l’Outre-Mer français des territoires exemplaires en termes d’énergie est bien anecdotique à l’échelle nationale au mondiale. D’autant plus qu’elle est masque une problématique TRÈS GRAVE sur ces territoires : la toute puissance de la voiture individuelle, avec un nombre d’immatriculations toujours en hausse et des transports en communs ridicules, inadaptés et délaissés, perçus encore comme une solution de transport subie par les personnes les plus défavorisées, ne pouvant se payer le permis de conduire et un crédit auto. La voiture est un signe de réussite sociale et économique, auquel on ne peut pas toucher.

Bref, l’autonomie électrique de La Réunion, c’est joli, mais c’est selon moi la goutte d’eau dans l’océan (qui se réchauffe) ET le pansement sur la jambe de bois…

Je voudrais conclure mes chroniques sur une lueur d’espoir, une bonne nouvelle, une belle initiative, un conseil simple… Côté changement climatique, il n’a guère de bonnes nouvelles, sûrement pas du côté de la COP21, cette grand-messe mondiale du climat prévue à Paris en fin d’année où tout le monde viendra en avion pour signer des accords vides sur papier recyclé.

Je vais me contenter de vous dire que oui, ça craint, que même le Pape nous le dit, en citant François d’Assise ! Mais pour qui ? Pour nous surtout.

« Loué sois-tu, mon Seigneur, pour sœur notre mère la terre, qui nous soutient et nous gouverne, et produit divers fruits avec les fleurs colorées et l’herbe ».

Cette sœur crie en raison des dégâts que nous lui causons par l’utilisation irresponsable et par l’abus des biens que Dieu a déposés en elle. Nous avons grandi en pensant que nous étions ses propriétaires et ses dominateurs, autorisés à l’exploiter. […] Nous oublions que nous-mêmes, nous sommes poussière.

Bien dit, Pancho ! Poussières nous sommes, poussières, nous redeviendrons.

En effet, si aujourd’hui, nous devrions faire des efforts pour limiter le réchauffement climatique, c’est peut-être pour sauver les koalas et les tigres, et surtout pour sauver notre peau ! Il ne s’agit pas de sauver la planète ni la vie sur terre, car elles ont déjà vécu des traumatismes et des crises lourdes, et s’en sont remises. La crise Crétacé-Tertiaire, il y a 65 millions d’années, doit nous amener à relativiser ce que l’on nomme la fin du monde, le voir seulement comme la fin d’une ère, à l’échelle géologique.

Sauver la planète n’est pas un enjeu, il convient juste de voir si sauver l’humanité en vaut la chandelle… Au pire, on laissera la trace archéologique d’une espèce Homo sapiens sapiens, savante peut-être, mais avide, déraisonnée, destructrice et vouée à sa propre fin.


Sources :

http://www.lemonde.fr/climat/article/2015/06/13/el-nino-de-retour-apres-cinq-ans-d-absence_4653508_1652612.html#SjmDCxUtJw57OCby.99

Ce n’est pas la planète qu’il faut sauver. C’est nous…

La Météorologie, n°88, février 2015.

rapport Météo France La Réunion http://www.meteofrance.re/climat/changement-climatique et Léa Dordone pour la Terre Adélie.

3 réflexions sur « L’été sera chaud ! »

Offrir un commentaire